• _A la 31eme chambre, avec les Sans-Papiers_

    Hebergeur d'image

    Mercredi 27 janvier,

    au Tribunal Grand Instance (TGI) de Paris, en soutien aux inculpés de Vincennes.
    31eme Chambre, 13h30, la salle d'audience est déjà pleine. La juge d'instruction refuse ceux restant debout.
    Une soixantaine de personnes venues soutenir reste à l'extérieur.


    -A l'extérieur de la salle d'audience, ceux soutenant les inculpés-

    L'audience ne commence que vers les 15H.
    Une foule de gendarmes restent, surveillent le hall et bloquent l'accès aux toilettes après les dégâts (graffitis) de la veille. 
    16h, la foule se disperse et certain(e)s disparaissent devant l'attente incessante.
    Les gendarmes font rentrer au compte goutte les personnes voulant assister au procès.
    18h, nous arrivons à rentrer après une suspension.
    19h, nous apprenons (enfin) que Nadir Autmani, ce jeune de 20 ans, après 7 mois de prison et une grève de la faim, est libéré.
    Le public exprime sa joie ... sauf que le procès est loin d'être fini.

    La suite lundi 1er février, à 14h.
    La juge a demandé de vérifier les preuves et de visionner à nouveau les vidéos des caméras de surveillance du CRA de Vincennes (et pas celles à l'extérieure (?)). 

    Hebergeur d'image


    Plus d' Infos > http://www.migreurop.org/

    A travers l’Europe, les sans papiers luttent dans les centres de rétention à Vincennes, à Vottem en Belgique, à Kumkapi-Istanbul en Turquie, à Malte, en Grèce, en Italie...etc. Les révoltes dans les camps fermés d’Europe sont l’illustration du « ras le bol » des migrants d’être enfermés et maltraités du simple fait d’une entrée ou d’un séjour irrégulier sur le territoire.

    Le 22 juin 2008, le centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes a pris feu alors qu’une révolte avait éclaté en son sein suite au décès d’un des détenus. Les 25, 26 et 27 janvier 2010, la 31ème chambre du Tribunal correctionnel de Paris jugera les dix personnes mises en examen dans l’incendie du centre de rétention de Vincennes du 22 juin 2008.

    Migreurop dans le cadre de sa campagne pour un droit de regard [1] dans les centres de rétention réalise une observation judiciaire du procès.

    Le contexte :

    Le décès de Salem Souli, la goutte d’eau

    Monsieur Souli, ressortissant tunisien, placé en rétention en vu de son renvoi, est décédé dans le CRA de Vincennes, le 21 juin 2008. D’après les témoignages recueillis [2] , le 20 juin, il aurait demandé à aller à l’hôpital, les policiers l’auraient emmené voir l’infirmier qui lui aurait affirmé qu’il était en bonne santé. Il n’aurait pas dormi de la nuit et aurait commencé à crier de douleur le matin du 21 juin. A 15h00, il ne se réveillera pas de sa sieste. Pourtant, les autorités ne feront rien pour chercher et informer ses proches. Le fils de Monsieur Souli n’a appris le décès de son père que quatre mois plus tard, la mère de l’enfant a porté plainte pour “rétention d’information, homicide involontaire par manquement aux obligations de sécurité, et omission de porter secours” [3] . Les conditions du décès de Monsieur Souli ne sont toujours pas connues bien qu’une autopsie ait été diligentée en France ainsi qu’en Tunisie où le corps a été rapatrié mais seulement des conclusions lacunaires ont été transmises [4] . La Cimade, seule association à avoir eu accès au CRA à l’époque, et la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) se sont constituées partie civile. L’atmosphère électrique du centre n’a pas pour seule origine le décès de Monsieur Souli : elle n’a pas été attisée par les associations et les soutiens à l’extérieur du centre de rétention comme a essayé de le faire croire la Préfecture de Police de Paris [5] ou Monsieur Frédéric Lefebvre, porte parole de l’UMP [6] , mais elle découle bien d’un profond climat de tension palpable depuis plusieurs mois.

    Le CRA de Vincennes ou l’industrialisation du renvoi des étrangers par la France

    La révolte du 22 juin 2008 était prévisible. Le centre de rétention de Vincennes était à l’époque le plus grand de France, séparé en deux bâtiments (CRA 1 et CRA 2) de 140 places chacun. Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoit à son article R 553-3 que les centres ne dépassent pas une capacité de 140 places. Malgré l’artifice juridique qui consiste à faire croire qu’il y avait à Vincennes deux centres distincts, on était bien face à un centre de rétention de 280 places, bien au-delà du nombre de places prescrites par la réglementation. Les constats effectués par la Cimade, seule association qui était autorisée à entrer en centre de rétention avant janvier 2010, ne laissent aucun doute à ce sujet : « Il s’agit de la même gestion de police, un seul commandant secondé d’un capitaine, un bureau unique qui centralise les dossiers, les mêmes escortes, le même service médical... » [7] . L’association dénonce par ailleurs l’agencement du centre : « Sa configuration spatiale, l’exigüité des locaux, le peu d’espace de promenade, le contact humain réduit à l’extrême, les guérites de surveillance, la multitude des caméras, les rouleaux de barbelés posés en double transforment Vincennes en un véritable camp de rétention » [8] . La Cimade dénonce depuis longtemps les conditions d’enfermement dans ce centre et met en avant le risque de tension aigue entre les détenus, mais également entre la police et les détenus. Dans son rapport 2007 sur les centres et locaux de rétention administrative, l’association rapportait plusieurs évènements qui avaient échelonné l’année : violences entre détenus, grève de la faim, refus de monter dans les chambres, violences des policiers sur les détenus mais également violence des détenus sur les services de sécurité privé du centre...etc. L’association liait déjà clairement la superficie du centre, machine de déshumanisation, avec l’émergence de la violence ainsi que le sentiment d’insécurité des détenus [9]. En 2008, La Cimade continuait d’alerter les autorités et mettait en évidence dans son rapport annuel l’accentuation du climat d’insécurité et de violence qui règne dans le centre. Ainsi étaient mentionnées courant février 2008 des violences physiques de la part des services de police contre les détenus. Courant avril 2008, les détenus se sont mobilisés en rétention, faisant écho à des mobilisations à l’extérieur du centre, en déchirant leur carte d’identification ; d’autres ont entamé une grève de la faim en réaction à la mort d’un sans papier décédé en sautant dans la Marne afin de fuir un contrôle d’identité. Début juin 2008, plusieurs faits de violences physiques de policiers sur les retenus étaient relevés, les détenus continuant de se mobiliser pour revendiquer leur droit à la liberté [10] . La tension était donc à son comble à la veille du décès de Monsieur Souli.

    Outre ces avertissements, la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administrative et des zones d’attente (CRAZA) avait tiré quinze jours avant l’incendie la sonnette d’alarme dans un rapport remis au gouvernement. Elle y soulignait le "climat de tension et de violence qui règne de façon permanente dans tous les CRA et spécialement à Vincennes, où un rien suffit à mettre le feu aux poudres" et souhaitait "très fermement que la capacité du pôle de Vincennes soit ramenée" à 140 places maximum [11] .

    Après des travaux, le CRA de Vincennes a rouvert en novembre 2008, avec une capacité d’hébergement de 120 places actuellement, 180 prévues à partir du mois de septembre.

    Les faits :

    Le 21 juin 2008, Monsieur Salem Souli décède au centre de rétention de Vincennes. D’après les témoignages [12], les détenus ont souhaité avoir des explications sur les circonstances de ce décès. Ils auraient formulé cette demande à plusieurs reprises sans qu’aucune explication ne leur soit donnée. Une marche silencieuse en mémoire de Monsieur Souli fût organisée par les détenus, le 22 juin 2008, en début d’après midi.

    D’après certains témoignages [13] , au CRA 2, la marche a été interrompue par les services de police qui aurait essayé de faire rentrer les détenus dans leurs chambres et aurait gazé les plus virulents. La tension serait alors montée d’un cran. Les détenus seraient rentrés dans leurs chambres mais en seraient sortis avec des matelas. Au même instant, toujours d‘après les témoignages, les policiers se seraient dirigés en masse vers le CRA 1 [14] puisque apparemment, une révolte était également en cours. Selon certains témoins, le gros de la révolte - et de la répression - aurait eu lieu au CRA 1. Les témoins du CRA 2 affirment qu’ils pouvaient sentir l’odeur des gaz lacrymogènes et entendre les cris venir du CRA 1 [15]. Des témoignages venant du CRA 1 affirment que des policiers ont frappé et gazé plusieurs détenus qui étaient dans leur chambre [16] . La tension aurait encore augmenté. Puis, il y a eu le feu. Les témoignages divergent concernant les départs de feu. Certains pensent que le feu est parti du CRA 1 [17] , d’autres du CRA 2 [18] . Le Syndicat Général de la Police [19] affirme qu’un premier départ de feu a eu lieu du côté de l’avenue de Gravelle pour ensuite se diriger vers le parking. Certains témoins rapportent que les pompiers auraient mis du temps à arriver [20]. Les détenus auraient été rassemblés dans le gymnase de l’école de police attenante au centre. D’après les témoignages à l’intérieur du centre, la situation était apocalyptique et traumatisante, les détenus ayant le sentiment que les policiers voulaient “sauver les meubles” [21] plutôt qu’eux. Dix huit personnes ont été conduites à l’hôpital pour intoxication, le reste des détenus a été transféré et réparti comme suit dans d’autres centres de rétention à travers la France [22] :

    Nîmes-Courbessac : 100 personnes Lille-Lesquin : 54 personnes Paris-Dépôt : 40 personnes Rouen-Oissel : 22 personnes Palaiseau : 18 personnes Mesnil-Amelot : 10 personnes

    La plupart ont été libérés et d’autres déférés au parquet pour être entendus. Dix personnes ont été mises en examen pour "destruction de biens par incendie" et "violence volontaire sur agent de la force publique". L’un d’entre eux est actuellement détenu, deux autres sont sous mandat d’arrêt, les sept restant ont été remis en liberté. Les prévenus risquent jusqu’à dix ans de prisons et 150 000 euros d’amende [23] .


  • Commentaires

    1
    HA
    Jeudi 28 Janvier 2010 à 10:08
    Inculpés de Vincennes
    Aujourd'hui l'audience a repris à 13h30. La juge, qui a bien condamné et enfermé l'un des inculpés en 2005, avec des conséquences graves par rapport à ses gamins mis à la DASS... et bien cette juge est maintenue pour ce procès. De suite les avocats de la défense l'ont prise à partie, et la pauvre juge est sortie trois fois de la chambre, pas contente la juge. Ca a gueulé aussi parce que juge et procureur (qui rappelons-le, lundi, quand la juge a écorché le nom d'un inculpé et a été reprise par son avocate, a déclaré qu'on dira son nom correctement quand il aura des vrais papiers) parlaient tout bas, refusant d'abord d'utiliser les micros, et donc ça a gueulé aussi dehors, et là une soixantaine de gendarmes a débarqué pour encadrer tout ça. Ensuite les avocats ont commencé par plaider la nullité du procès pour vices de procédure, pour les actes et les 35h de vidéo des caméras de surveillance du centre du jour de l'incendie auxquels ils n'ont pas eu accès entre autres. Puis c'est passé au cas de Nadir Otmani, dernier inculpé encore en détention préventive (qui fin novembre avait fait une grève de la faim, puis avait été hospitalisé, puis réincarcéré), et ce depuis 7 mois. Eh bien il a été libéré ce soir, quelques personnes sont allées le chercher à sa sortie de Fleury. Putain de merde ça fait plaisir !!! C'est la seule concession que ce tribunal Républicain a bien voulu faire. En effet le procès est reporté à ce lundi 1er février à la 16e chambre du palais de Justice de Paris. Le "fond" de l'affaire, l'incendie, n'a pas encore été abordé. Quatre jours pour étoffer la défense et avoir accès aux pièces demandées, c'est court. Dans le même temps vers 18h, l'agence Air France d'Opéra s'est vue bloquée et occupée par une trentaine de personnes, avec une banderole "Air France expulseurs, liberté pour tous avec ou sans papiers", ses murs et vitrines placardées d'affiches, des tracts diffusés sur le trottoir, et des faxs dénonçant sa collaboration à la machine à expulser et exigeant son arrêt envoyés depuis ses bureaux à la direction et à d'autres destinataires.
    2
    HA
    Mardi 2 Février 2010 à 11:15
    lundi 1er février 2010
    Aujourd’hui lundi 1er février au tgi de paris se tenait la 4ème audience du procès des 10 sans-papiers accusés d’avoir participé à la révolte collective qui, le 22 juin 2008, a abouti à la destruction du centre de rétention de Vincennes. Ce qui théoriquement devait être une audience de fixation de dates pour la suite du procès s’est en fait révélé être la suite pure et simple de la tartufferie initiée la semaine précédente. Les avocats de la défense ont demandé une concertation sur le calendrier des audiences, s’appuyant notamment sur un article du code de procédure pénale, et sur les contingences liées à leurs impératifs professionnels. Le bâtonnier était venu soutenir leurs demandes. La juge, comme la semaine précédente, leur a opposé une fin de non recevoir, déclarant que les audiences se poursuivraient à partir d’aujourdhui, à savoir demain, après-demain, et les semaines suivantes. Les avocats ont alors décidé de quitter unanimement la salle suivis par le public. Décontenancée, la juge ordonne cependant le visionnage des vidéos du centre 1, puis, suspend l’audience pour soi-disant charger les films. Au bout de 10 minutes, elle revient s’enquérir des disponibilités des parties civiles (Etat et policiers plaignants atrice Beaufort, Nicolas Carlot, Jérôme Dupuy, Jonathan Faure, Sandrine Schenk, Corinne Tamas ). Un policier signale alors être indisponible le 10 février. La juge lui propose donc de s’exprimer le 9 février... Comme quoi, on peut toujours s’entendre ! Commence alors le très long visionnage des vidéos du centre 1, visionnage souvent interrompu par divers problèmes techniques, "le logiciel étant très compliqué" dixit la juge, "et ne permettant pas de faire des arrêts sur images". Comme cela lui semblait long et inutile pour démontrer la culpabilité de qui que ce soit, la juge, Nathalie Dutartre, a demandé à visionner plusieurs films en même temps (jusqu’à 7 vidéos simultanées sur le même écran) et à accélérer l’image. Tout au long du visionnage, elle passe son temps à compulser ses dossiers, ne s’arrêtant que quand le procureur Flam lui montre ce qu’il faut voir. Dans un silence total, ponctué par quelques messes basses entre le procureur et les juges, on pouvait entendre le cliquetis de la pendule Lex qui trône dans la salle. Parfois, s’élève la voix du procureur qui fait remarquer "la liberté de circulation totale des retenus dans le centre de rétention" ainsi que "les décentes conditions de rétention" ou encore le calme incroyable regnant dans le batiment E où " ils [les retenus] déambulent tranquillement". Sur les vidéos, on ne voit rien de probant, si ce n’est des gens qui vont et viennent. Même un policier plaignant soupire " Y a que dalle". A un moment la juge intervient en regardant sa montre " Je pense qu’on a tout vu", "non, non" lui signifie la greffière. Les films continuent. Entre deux soupirs, le procureur, qui a pris la place d’un des deux assesseurs, est à l’affût d’images compromettantes. Sur l’une des sept vidéos qui se déroulent simultanément sur l’écran, on voit des retenus sortir une porte dégondée dans le couloir. Il se lève, tout sourire, montre quelqu’un : "C’est X ! Euh, non c’est Y. Il essaie de casser la porte. Il est très sportif mais ça ne marche pas. Oui c’est X, enfin Y. Il n’est pas reconnaissable parce qu’il a une manche relevée. Ah zut, celui-là on n’arrive pas à savoir qui c’est." Il est 19h25, la juge annonce la fin du visionnage des vidéos du centre 1. " Demain, à 14h, nous verrons tout ce qui s’est passé au centre 2, ce sera plus long. " Le film est mauvais et les acteurs de la pièce de théâtre sont pitoyables. Même si quelques personnes s’y rendront pour vous dévoiler la suite du feuilleton... Liberté pour tous avec ou sans papiers. Fermeture des centres de rétention. Liberté de circulation et d’installation. PS : les quelques personnes arrêtées à la sortie du TGI ont été libérées.
    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :